L’avènement des réseaux sociaux a transformé progressivement les médias classiques. Toute personne a l’occasion aujourd’hui de s’exprimer publiquement, cependant ce journalisme participatif est-il porteur de la même qualité concernant l’information diffusée ? Est-il une menace pour les médias traditionnels ? Laïd Zaghlami, professeur à la faculté de l’information et communication de l’université d’Alger 3 a tenté d’apporter des éléments de réponses lors de la 48e session de formation de Club de presse Ooredoo. Une chose est sûre : face aux nouveaux médias, les médias conventionnels sont sous la contrainte de se réformer, à défaut ils subiront toutes les pressions qui perturbent leur existence. La remise en question concerne autant le secteur public que privé. Sous d’autres cieux plus digitaux que le nôtre, on ne parle plus de journaux ou de magazines mais de «marques de presse». Pour que la notion de marque émerge à partir d’un titre, il faut que celui-ci soit associé à des bénéfices forts et exclusifs. La fidélité, l’attachement et la confiance sont trois caractéristiques d’une marque de média fort. Malgré des différences entre le papier et la version électronique, il n’y a pas de rupture identitaire. La déclinaison internet a créé des univers «Santé» et «Voyages», tout à fait cohérents avec l’univers éditorial du titre, et qui permettent la commercialisation de produits ou de services associés à ces univers. Il existe des outils pour renforcer la marque de presse sur Internet : la mise en page, le graphisme, l’ergonomie, et bien sûr la qualité des contenus. Mais en Algérie, on est très loin de cette réalité. Rares sont les titres qui ont opté pour la spécialisation dans un contexte marqué par la dominance de supports médiatiques aussi multiples que complexes. Le journaliste couvre aujourd’hui une conférence de presse sur l’épidémie d’Ebola et demain, une rencontre sur le lancement d’un produit informatique. Sur les sites web, il n’y a que la photocopie du print : aucune valeur ajoutée ! Le traitement de l’information est souvent biaisé, orienté et subjectif, à telle enseigne «qu’on axe souvent sur les hommes et les personnalités plutôt que sur les faits».
A bien regarder ce qui se passe dans le monde, notamment autour de nous, l’Algérie ne peut plus se permettre de vivre en vase clos en tournant le dos aux réalités médiatiques qui nous viennent du ciel au risque de connaître les pires désillusions à l’avenir. La télévision et à un degré moindre les ondes radiophoniques privilégient une information à sens unique qui exclut le débat contradictoire, en faisant la part belle aux officiels. Le JT de 20 heures en Algérie est ennuyeux et très protocolaire. Le présentateur ouvre généralement le journal sur la réception par le président Bouteflika d’un envoyé spécial sur une question internationale (Darfour, Mali…). En quoi ce fait banal de la diplomatie algérienne intéresse le citoyen ? Si le Président reçoit une lettre amicale d’un homologue, l’ENTV prend soin de nous la lire intégralement ! Ainsi, elle finira par perdre toute crédibilité si elle continue à prôner un journalisme de forme, de protocole et de façade. Idem pour la presse écrite où on confond presse publique et presse gouvernementale. Et le journalisme citoyen et les médias sociaux sont une alternative pour les citoyens soucieux et curieux de connaître la vérité.
Les citoyens se prennent souvent ainsi en charge à travers des blogs, réseaux sociaux et sites électroniques. Exemple : les émeutiers du logement qui ont bloqué récemment le tunnel de l’Oued Ouchayeh, à l’Est d’Alger n’ont pas été satisfaits de la couverture médiatique et ont balancé des photos sur Facebook. Les médias sociaux, tels que Facebook, Twitter, Linkedin, Myspace, Orkut, Flicker, Hi5, You Tube, Basecamp, Viadeo et Webwag sont devenus une source de données et d’information à l’état brut. Le pouvoir politique parle de changements et de défis. Si en théorie, le message semble clair, il reste que dans la pratique, il perd en cours de route tout son contenu.