Espionnés consentants du Net, indics involontaires de tous les flics du monde et notamment des Américains, les plus obsédés par le trou de serrure numérique, vous avez aimé Prism, vous allez adorer encore plus Xkeyscore !
Car c’est encore plus fort ! C’est parce que vos empreintes numériques sont partout et que votre Smartphone et votre tablette sont vos meilleurs mouchards. Et que, surtout, les géants de la Toile, Facebook, Apple, Google pour bien les nommer, sont complices des mastodontes américains du renseignement. Voilà l’affaire. Vous êtes ainsi l’objet d’une filature permanente et sans doute n’êtes-vous pas encore prêts de vous libérer, webaddicts que vous êtes, de ces chaînes algorithmiques qui facilitent tant votre flicage perpétuel. Alors, sachez-le, technophiles et tout geeks que vous êtes, le pire ennemi de l’internaute à la recherche d’un tant soit peu d’anonymat est sans doute son Smartphone — et, par extension, sa tablette –, parfait p’tit espion de poche, équipé d’un système d’exploitation (OS) ou Androïde tant prisés par les grands espions américains. Et ces derniers n’ont pas fini de complexifier la filoche. Un programme ultra sophistiqué dénommé Xkeyscore permet en effet à la NSA de surveiller en temps réel tous les e-mails, chat et navigation Internet de n’importe qui dans le monde. Les révélations sur l’espionnage tous azimuts de l’Agence nationale de sécurité américaine (NSA) n’en finissent donc pas de rebondir. Après l’affaire Prism, révélée par l’Américain Edward Snowden, le 31 juillet, le site de The Guardian révèle à son tour un document interne de la NSA datant de 2008 qui fait l’effet d’une grosse bombe. Y sont mis à jour, dans le détail, les mécanismes du plus vaste programme de cybersurveillance jamais établi dans le monde, ce qui, du même coup, corrobore les affirmations de Snowden. Ainsi, avec Xkeyscore, la NSA peut aisément accéder à l’historique de navigation et de recherche, aux e-mails et aux chats de n’importe quel individu dans le monde du moment qu’elle dispose d’une adresse IP. Pas moins de 500 serveurs géants sont disséminés à travers le monde pour Xkeyscore, l’œil géant du cyclope NSA. Bigre ! Ce programme ultrasecret de surveillance d’Internet offre à ses analystes des résultats extrêmement pointus. Pour les e-mails, par exemple, les champs « destinataire », « copie carbone » (CC) et « copie carbone invisible (CCI) sont directement accessibles à partir d’un simple nom ou d’un banal pseudo. Inouï ! La pertinence des résultats de Xkeyscore demeure tout aussi précise sur les réseaux sociaux. Et, en la matière, le forum de mark Zuckerberg est ce qui existe de pire en matière de vie privée. Donc, au sein des nombreuses bases de données, la NSA, tout comme d’ailleurs tous les flics du monde, peut « visionner » les messages échangés sur Facebook ou même faire des regroupements en fonction de la langue utilisée et des régions géographiques où sont postés ces messages. On arrive alors à distinguer les profils dits « normaux » de ceux qui correspondent dans une langue supposée « anormale » sur des sujets prétendus « dangereux »… bref, un fichage en règle de tous les sujets sensibles déterminés selon les critères sécuritaires de la NSA. Même chose pour la navigation sur le Web. Le document révélé par The Guardian explique que toute recherche sur des « thèmes dangereux » est collectée via l’historique de navigation des internautes. Les documents échangés sont aussi systématiquement triés et analysés. Plus dangereux encore, les capacités de Xkeyscore permettent de localiser tous les VPN, ces fameux tunnels de connexions sécurisés, dans n’importe quel pays et surtout d’analyser les métadonnées transférées par ces VPN. Ceux qui se croyaient à l’abri en sont donc pour leurs frais ! Pis encore, pour disposer de ces gigantesques bases de données, la NSA, qui prétend ne viser que des « cibles légitimes de renseignements étrangers », n’a besoin d’aucune autorisation préalable. Alors, après cet impressionnant déballage des possibilités illimitées de Xkeyscore, la NSA précise que les données collectées ne sont stockées que de trois à cinq jours… sauf, bien sûr, celles qu’elle juge « appropriées ». Que dire donc de cet activisme sécuritaire si ce n’est qu’il s’agit d’espionnage généralisé, de contrôle et de fichage total d’une société ! Et, cerise numérique sur le gâteau sécuritaire américain, on sait grâce à Prism que Microsoft aurait collaboré activement avec la NSA et le FBI pour leur ouvrir l’accès à Outlook, Skype et Skydrive (stockage). Microsoft est-il ainsi un collaborateur zélé des services secrets américains ? La question se pose légitimement, selon des extraits de documents fournis par Edward Snowden, l’informaticien de la NSA, désormais réfugié politique en Russie, révélés parThe Guardian. Ces documents dressent le détail de la collaboration entre l’éditeur américain et les agences fédérales NSA et FBI. Celles-ci souhaitaient intercepter les échanges électroniques transitant par les divers services en ligne de Microsoft.
D’après ces révélations, la NSA s’inquiétait de ne pouvoir déchiffrer les chats via Outlook.com, lorsque le chiffrement a commencé à être testé sur ce service en juillet 2012. En décembre de la même année, la NSA et Microsoft auraient trouvé une solution à ce problème en contournant le chiffrement et ce, avant même que le service ne soit ouvert commercialement début 2013. Un autre document stipule d’autre part que la NSA aurait accès aux courriels sur Hotmail, Outlook et Live, avant qu’ils ne soient chiffrés lors de leur envoi. Et on n’est pas encore au bout de ses peines : Le service de stockage en ligne Skydrive aurait également été l’objet d’une coopération étroite entre l’éditeur et le FBI qui aurait obtenu un accès direct à ces données stockées. Enfin, la NSA aurait consacré des efforts particuliers pour pouvoir collecter les communications échangées par Skype. Ce service d’échanges voix-chat-vidéo avait été intégré au programme Prism d’écoutes des communications électroniques quelques mois avant que Microsoft ne rachète l’entreprise à l’été 2011. Et la mise à nue continue. Allègrement. Un autre document révèle qu’une nouvelle fonction de surveillance des échanges vidéo sur Skype aurait permis en juillet 2012 de tripler la collecte de ces communications par l’agence NSA. L’ajout de ces flux serait venu compléter l’interception de la portion audio de ces mêmes sessions vidéo, déjà réalisée avec succès. Et pourtant, Skype recourt – du moins c’est ce qu’il prétend -, à un protocole de communication «propriétaire» réputé difficile à intercepter. Mais c’était sans compter sur la coopération « patriotique » de Microsoft avec les services secrets US… Ceci dit, à une époque, marquée par le Web applicatif, qui est lui-même à la veille de basculer vers le Web prédictif, les TIC sont apprivoisées par un Big Brother dont la boulimie numérique est mise au service d’une obsession sécuritaire sans limites. Le passage du Web des documents à celui des profils sur des forums sociaux où les internautes mettent eux-mêmes en scène, avec un certain narcissisme, leurs vies privées, permet de traiter les individus de manière documentaire. Ils deviennent une somme d’informations qui est passée au crible d’algorithmes de plus en plus complexes. Le Web applicatif, c’est-à-dire avec des applications qui sont autant de clés d’accès facile à votre intimité, est en plein essor et le Web prédictif n’en est qu’à ses débuts. Et Mazal él khir él gouddam. C’est dire après tout que le trou de serrure a un radieux avenir numérique devant lui. Grâce à votre complicité volontaire ou à votre passivité active. C’est selon, chers espionnés finalement consentants.