«Au lieu d’investir et de construire une usine, permettre l’emploi, j’aurais mieux fait d’ouvrir un comptoir et de ramener des conteneurs», nous avait affirmé un investisseur algérien dans le domaine des TIC en Algérie. Mais pourquoi, au moment où notre pays fonce irrémédiablement dans le domaine des services et des nouvelles technologies, un investisseur regrette ce qu’il a entrepris ? Il existe deux cas de figure qui peuvent tout autant constituer la réponse recherchée : le premier réside chez une entreprise publique et le second une société privée.
La première est une entreprise nationale. Bien que créée seulement en 1997 par scission de l’ENICAB, Catel exerce un métier s’appuyant sur une activité qui remonte à plus de 70 ans lorsque fut née l’activité de câblerie de télécommunications. Aujourd’hui, Catel est une société par actions (SPA) au capital social de 180 millions de dinars, dont 94% du chiffre d’affaires est assuré par les besoins en câbles divers d’Algérie Télécom, Sonatrach, Sonatite et de la SNTF.
Après plusieurs années de production de câble cuivré, et vu la demande croissante dans le monde et surtout dans le pays en ce qui concerne le volet pointu des télécommunications, Catel a entrepris un partenariat et lancé tout récemment la production de câble à fibre optique avec la création d’un joint-venture avec un partenaire étranger. Aujourd’hui, Catel «croule» sous un stock énorme de câbles à fibre optique et ceux qui l’utilisent continuent à l’importer alors que des entreprises européennes installées en Algérie, à l’image de Siemens, l’achète auprès de Catel avec toutes les garanties nécessaires, en plus «du transport jusqu’au chantier», précise M. Saïd Zekraoui, directeur de la planification et du développement chez Catel. Et d’ajouter : «Notre produit est testé à 100% et nous permettons même à nos clients de procéder à des essais chez nous.» D’un côté un stock énorme et, de l’autre, des demandes d’importation de câbles à fibre optique par bateaux entiers. Il y a quelque chose qui ne va pas.
L’autre cas de figure est représenté par une entreprise privée qui s’est spécialisée dans la fabrication de cartes intelligentes, et de surcroît à la norme EMV (EuroMaster Visa) pour ce qui est des cartes monétiques, et dans la sécurité et les solutions biométriques. Un investissement énorme avec la possibilité de «toucher» cette technologie et en même temps de l’avoir «chez soi». Ce n’est pas un centre de personnalisation qui utilisent des appareils d’impression sur des cartes prédécoupées mais HB Technologies, installée à Rouiba, est bel et bien une usine de fabrication de cartes à puce qui maîtrise le processus de bout en bout. C’est-à-dire que l’on part du granulé et on arrive à la carte finie en passant par l’insertion de la puce et la personnalisation avec des appareils professionnels et pointus. Aujourd’hui que l’unité est fin prête, aucune commande n’arrive de l’intérieur. Seulement des commandes qui viennent de l’étranger. Un peu comme si l’hôpital se foutait de la charité ! En fin de compte, les deux investisseurs, un public et l’autre privé, et combien d’autres que nous n’avons pas encore vus, se heurtent au mur des bons de commande et surtout au fait que l’entreprise algérienne ne fait pas confiance au produit national qui, lui, crée de l’emploi et est structurant. Malheureusement, cet état de fait est général et ce, quels que soient le produit ou le service. D’un autre côté, nous pouvons aisément voir des sociétés érigées en «comptoir» prendre de très grosses parts du marché algérien sans réellement s’impliquer ni y investir. Alors comment inverser cette tendance qui risque, à terme, de signer l’arrêt de mort de tout investissement national en Algérie?