Néanmoins, il faut savoir qu’une seule copie du logiciel « JAWS » coûterait entre 1 500 et 2 000 euros, et pour ce qui est des imprimantes en braille, elles atteignent les 5 000 à 10 000 euros, ce qui limite considérablement l’accès à ce type de solution pour une personne aveugle en Algérie
Avec pour principal slogan « Voir par le Savoir », une première rencontre organisée autour de la thématique des technologies de l’information et de la communication au service des non-voyants a eu lieu au palais de la Culture Moufdi Zakaria le 7 avril dernier. Initiée par l’Association nationale des éducateurs et enseignants spécialisés pour les personnes aveugles ; à sa tête M. Ali Hayouna, cette rencontre a eu pour objectif de rappeler l’importance de l’informatique dans le processus de formation et d’accès à la connaissance et au savoir des personnes aveugles. Elle fut aussi l’occasion de prendre conscience de la situation dans laquelle les handicapés vivent et les nombreuses difficultés que rencontre cette catégorie de la population depuis la mise en place de la loi 02-09 du 8 mai 2002 qui a réduit considérablement leurs droits. Le premier à avoir pris la parole lors de cette rencontre était M. Abderrahmane AMALOU, auteur, poète et ami engagé de la cause des non-voyants en Algérie. Il est le premier auteur algérien à avoir transcrit ses différentes œuvres en langage braille et sur support informatique adapté. Pour M. Amalou, « l’accès des personnes handicapées à l’information, la culture et le savoir est un droit fondamental » et de rappeler la nécessité d’adapter et de faciliter l’accès au savoir à cette catégorie de personnes par le biais des technologies de l’information et de la communication. Pour M. Ali Hayouna, « l’outil informatique doté d’un programme adéquat va permettre aux non-voyants d’être à chances égales avec les personnes normales ». « Le but de cette rencontre est de vulgariser l’utilisation de l’outil informatique pour l’ensemble de cette communauté », a-t-il rajouté. La première partie de cette journée fut consacrée à la présentation des différents logiciels dédiés aux non-voyants ou ce qu’on appelle communément l’« informatique adaptée ». Elle était dirigée par M. Salim Khentouche, en sa qualité de formateur en informatique adaptée et chargé de l’espace braille au niveau de l’université de Biskra. Après avoir rappelé dans un premier temps l’histoire de l’informatique adaptée, qui fut marquée par la réalisation du premier langage informatique pour aveugle par la société IBM, M. Khentouche a par la suite énuméré les derniers logiciels développés en matière d’aide et d’assistance aux personnes non-voyantes, comme le plus connu d’entre eux, « JAWS » (Job Access With Speech) qui fut conçu en 1989 par l’ingénieur Ted Henter. « JAWS consiste à analyser et à reconnaître ce qui est affiché sur le moniteur afin de permettre au non-voyant d’accéder à ce contenu, soit à travers l’afficheur braille ou bien par la synthèse vocale », a précisé M. Khentouche. Grâce au logiciel « JAWS », la personne aveugle peut réaliser les mêmes tâches qu’une personne claire-voyante et peut utiliser l’ensemble des applications disponibles sur un ordinateur, comme l’écriture et le traitement de texte. Parmi les autres logiciels « lecteur d’écran » cités par le formateur spécialisé, il y a « Windows Eyes » sous Windows, « Ocra » qui fonctionne sous Linux et enfin « VoiceOver » qui fonctionne, lui, sur Mac OS. « Une des principales utilisations de l’outil informatique est bel et bien l’Internet, et dans ce cas précis, les personnes non-voyantes utilisent le Web et ses différentes fonctionnalités de la même façon que les personnes normales, la seule différence se situe au niveau du temps de réaction et dans la vitesse d’accès à l’information », a-t-il indiqué. Il a poursuivi en disant que les non-voyants développent sur Internet, créent des sites Web et maîtrisent différents langages de programmation tels que le PHP ou le HTML et ceci sans l’intervention d’aucune personne. Un autre point discuté par M. Khentouche concernant l’informatique adaptée ; la question des imprimantes, et particulièrement des imprimantes en braille, qui constituent un élément essentiel de l’environnement informatisé des non-voyants. Néanmoins, il faut savoir qu’une seule copie du logiciel « JAWS » coûterait entre 1 500 et 2 000 euros, et pour ce qui est des imprimantes en braille, elles atteignent les 5 000 à 10 000 euros, ce qui limite considérablement l’accès à ce type de solution pour une personne aveugle en Algérie. M. Khentouche a mis le doigt sur un aspect essentiel qui est celui de la formation des personnes non-voyantes en Algérie. A ce sujet, le formateur spécialisé a indiqué la quasi-inexistence de structures qui prennent en charge la formation des non-voyants pour l’utilisation de l’outil informatique, et surtout le manque de personnels spécialisés pour faire de la formation dans ce domaine en Algérie. « Il existe depuis quelque temps des cellules qui sont mises en place au niveau des centres de formation professionnelle, qu’on appelle Info-braille. Cependant, elles manquent énormément de moyens », a-t-il ajouté. Pour information, il existe réellement 3 cellules Info-braille au niveau de l’ensemble des centres de formation sur tout le territoire national. La formation de personnes non-voyantes en Algérie se fait aussi à travers une école virtuelle, que M. Khentouche gère personnellement, et cela consiste à prodiguer des cours en ligne grâce notamment à l’application Skype, cette école a 500 personnes inscrites dont 280 non-voyants algériens. La deuxième partie de cette rencontre fut entièrement consacrée à l’analyse du cadre juridique qui est « censée » protéger les droits des handicapés en Algérie, mais qui se trouve « dénaturée et affaiblie » et loin de la réalité que vit cette catégorie de la société.