Diagnostiquer la panne du véhicule et trouver les solutions nécessaires est possible à travers la Toile. Il suffit de taper le «symptôme» du malaise sur un site de recherche pour se voir proposer des centaines de pages concernant les causes et les moyens de venir à bout du problème technique duquel souffre ce véhicule. En Algérie, le phénomène est en vogue et ne cesse de prendre des ailes. Plusieurs propriétaires de voitures tentent, en effet, de réparer les pannes en sollicitant les services, les conseils et les orientations de sites web spécialisés. L’objectif de cette nouvelle attitude est simple : éviter le déplacement chez le mécanicien du coin et réduire au maximum les dépenses liées à la remise en marche du véhicule. Il suffit par exemple de taper «faible tirage du véhicule de marque….», ou «perte d’équilibre du véhicule de marque…lorsqu’on tourne à gauche ( ou à droite)», « embrayage résistant et lourd du véhicule de marque…», pour se retrouver confronté à plusieurs pages web parlant du problème cité, et on trouve même des forums de discussions sur le sujet. Une démarche beaucoup moins contraignante, il faut l’avouer, que d’aller demander l’avis du mécanicien le plus proche et elle est même moins coûteuse. De nombreux jeunes férus de la Toile, nouvellement propriétaires de véhicules, exploitent cette voie virtuelle aux fins de comprendre le fonctionnement et les mécanismes nécessaires pour la bonne marche de ces véhicules. Et souvent, ils ne connaissent presque rien dans la mécanique, mais ils tâchent à «apprendre» les modalités et les moyens de réparation des véhicules, une qui n’est pas, faut-il le souligner, sans conséquences parfois désastreuses. «Depuis que j’ai acquis mon véhicule, il y a de cela une année, j’ai appris pas mal de choses sur le moteur à travers des sites web spécialisés. Je me suis même permis la prouesse de réparer à moi-seul un problème de câble d’embrayage. Je vous assure que j’étais guidé par seulement la Toile pour découvrir le problème et la manière d’agir. Je me suis, donc, dirigé vers un magasin de pièces détachées, j’ai acheté un nouveau câble d’embrayage et je l’ai changé sans l’aide de personne. Et puis, j’ai appris plusieurs autres aspects liés au système de freinage, de tirage et même d’équilibre et de parallélisme», se félicite Omar, la trentaine. Pour ce jeune enseignant dans un centre de formation professionnelle, Internet devrait aussi être mis au service de l’apprentissage dans tous les domaines. «Si j’avais sollicité l’aide d’un mécanicien, ça m’aurait coûté au moins 10 000 dinars entre la pièce de rechange et la main d’œuvre. Mais grâce à la Toile j’ai gagné deux choses : celle d’apprendre et celle d’éviter des dépenses qui auraient été synonyme de l’argent jeté par la fenêtre», se réjouit encore notre interlocuteur. Il s’agit du même réflexe que le phénomène de la e-médication, consistant, rappelons-le, à chercher des remèdes aux problèmes de santé dans des sites spécialisés. A la seule différence que le patient est, cette fois-ci, le véhicule ! Connus pour être férus de la toile et des TIC de manière générale, les jeunes Algériens font part, ces derniers temps, d’un esprit de pragmatisme poussé, essayant, à ce titre, de tirer le maximum d’avantages des sites spécialisés dans divers domaines. «On n’est plus à l’époque où Internet ne servait qu’aux discussions électroniques et à la tchatche souvent inutiles. Cette époque est décidément révolue, il est temps de tourner vers l’essentiel, c’est-à-dire utiliser la Toile pour le service des différents aspects de la vie quotidienne», tente d’expliquer, avec une certaine philosophie, Madjid, la quarantaine, comptable dans une administration publique à Alger. «Moi-même, j’insiste à tirer profit de la Toile, et je répare mon véhicule grâce aux orientations des sites spécialisés. J’essaye même d’aider mes amis et voisins dans ce sens, et je crois que je pourrai maîtriser toute la mécanique dans moins d’une année», affirme-t-il, optimiste.
Et le revers de la médaille ?
Lina, la trentaine, a aussi tenté de se servir de la Toile pour réparer une panne de sa nouvelle voiture. Elle a été poussée vers cette voie par son cousin, un jeune qui passe la majeure partie de son temps en face de son ordinateur portable, accroché aux différents sites web. La pauvre femme a placé des bougies de chauffage à l’envers. Le véhicule n’a pu démarrer et alors, son cousin, a tenté de remédier au problème en fouinant dans le système de démarrage. Et le véhicule a été carrément «mis à genou». Prise de panique, Lina appelle son époux et l’informe du dégât. Pris de frayeur, le concerné n’a trouvé d’autre moyen que d’interrompre son congé et rentrer vite pour amener le véhicule chez un mécanicien. Et le coût de la «tentation sur calcul d’épicie » était lourd : 15 000 DA ! Le mécanicien a, vite, compris la source du problème et saisi le fait que la voiture a été touchée par une main ne connaissant rien dans la mécanique. «C’est la sixième fois que je reçois un véhicule dans cet état. Les gens ne comprennent pas encore que seul le mécanicien est habile à réparer les pannes de mécanique et que la Toile ne peut nullement être un centre de formation dans ce domaine», a réagi ce dernier. «D’un côté, cette tendance porte préjudice aux propriétaires de véhicules et sert beaucoup plus les intérêts des mécanicien !», s’est-il, toutefois, félicité.
Faut-il expliquer Internet aux Algériens ?
De la e-médication à la mécanique, en passant par l’utilisation de la Toile pour des recettes de régime alimentaire et des leçons d’apprentissage des langues étrangères, les Algériens utilisent la Toile de façon souvent maladroite. Ils veulent se passer catégoriquement du monde réel et se servir du web dans tous les aspects de la vie quotidienne, ce qui s’avère préjudiciables à leur santé, leur poche et même à leur physique. Il est vrai qu’Internet offre plusieurs possibilités permettant aux gens d’évoluer dans leur vie, mais cet outil n’est pas apte à résoudre convenablement tous leurs problèmes. La modération dans son utilisation est, donc, plus que jamais inéluctable. Pour l’instant, les associations de la société civile continuent d’ignorer cet aspect de la vie sociale, en dépit de son important impact, et n’ont pas encore jugé nécessaire de mener des campagnes de sensibilisation à cet effet. N’est-il pas temps d’agir avant que les dégâts ne deviennent plus lourds ?