14 janvier 2025

Regis Carral, avocat associé, Bureau des Hauts-de Seine, France, analyse le monde des TIC « La réglementation ne se développe pas au même rythme que les technologies »

Le développement des TIC en général et du commerce électronique particulièrement nécessite à la fois un cadre législatif et réglementaire « cohérent » et une maîtrise de « l’approche contractuelle ». Le droit, au sens juridique du terme, en constitue ainsi une « composante essentielle » par la sécurité qu’il procure aux différents intervenants étatiques ou privés.
Regis Carral, avocat associé, Bureau des Hauts-de-Seine, France, membre de Landwell & Associé, société d’avocats, estime, dans une déclaration à IT Mag, que beaucoup de projets en Algérie se heurtent à une réglementation qui n’a pas réellement évolué. En tout cas, elle ne se développe pas au même rythme que les technologies de l’information et de la communication (TIC). Conséquence, des entreprises, des banques, des institutions ont l’ambition de réaliser des projets, mais elles  n’arrivent pas à le faire, en raison de blocage lié la législation. Et cette situation n’est pas le propre de l’Algérie, beaucoup de pays la vivent, dit-il. Pris comme modèle de référence lors d’une rencontre sur le droit et les TIC organisée dernièrement par le Cerist, la BDL, par exemple, pourrait élargir ses services en utilisant un procédé de signature électronique au moyen d’un certificat X.509 mais, à ce jour, l’ARPT, en sa qualité « d’autorité de certification », n’a pas encore publié son cahier des charges. « La norme X.509 est largement utilisée dans le monde et présente une grande sécurité », soutient-il. La BDL a mis au point un système de paiement électronique sophistiqué grâce aux nouvelles technologies de l’information, mais qui n’a pas été mis en service. Il s’agit là d’une institution financière commerciale. Si elle a réussi à mettre en œuvre un tel procédé, cela lui rapporte de la valeur ajoutée. Mais quelles sont les raisons qui font que le commerce électronique n’arrive pas à se développer dans beaucoup de pays, dont l’Algérie ? Pour Regis Carral, la question comporte un pessimisme qu’il convient de relativiser. Il relève que les séminaires et les conférences organisés, ces dernières années en Algérie,  permettent  d’établir que l’Algérie a réalisé des progrès réels et rapides tant sur le plan technique que juridique, dans le domaine des technologies de l’information et de la communication. Ainsi, et sur le plan technique, le partage d’expérience de banque en ligne présenté, il y a quelques jours,  par la BDL a montré que la technologie est maîtrisée et l’offre prête, rappelle-t-il. Le même constat s’impose quant au projet de plateforme de transaction de titres de transports aériens mené jusqu’au plan opérationnel par la SATIM, ajoute Carral qui relativise toutefois son optimisme : « Ces projets se heurtent à une réglementation qui n’a pas évolué à la même vitesse que la technologie. » Ainsi, la BDL pourrait utiliser la signature électronique mais elle attend que l’ARPT, en sa qualité d’autorité de certification, débloque la situation. « La norme X.509 dont je parlai est largement utilisée dans le monde et présente une grande sécurité », affirme-t-il.  Regis Carral poursuit : « Je pense toutefois que l’expérience pourrait être poursuivie avec la mise en place d’un tiers de confiance ‘‘ conventionnel ’’ en attendant cette publication, approche contractuelle pragmatique qui ne semblait pas heurter l’ARPT. D’une manière générale, deux recommandations peuvent être formulées pour favoriser le développement des TIC : privilégier l’adoption de textes posant des principes généraux, aux textes ‘‘techno-dégradables’’, pris en urgence en réaction à telle ou telle évolution technologique » ; assurer la cohérence des textes nationaux avec ceux des « grandes régions du Monde » afin de ne pas créer des barrières juridiques à un commerce électronique qui par nature ne connaît pas de frontières. Cette même « techno-gradabilité » sur laquelle est longuement revenue la spécialiste tunisienne, le Dr Djerad Najwa  lors du séminaire sur le droit dans les TIC où elle avait mis le doigt sur le cycle de vie d’un certificat électronique qu’il faudra chèrement payer à renouveler. C’est d’ailleurs cette même problématique sur laquelle a buté la France au début des années 2000 ; prétextant la « souveraineté et l’indépendance technologiques ». Et la question de l’enseignement du droit dans tout cela ? N’y a-t-il pas nécessité aujourd’hui  d’intégrer, par exemple,  un module de « droit des TIC »  dans l’enseignement  supérieur ? Regis Carral analyse cet aspect et explique : « On l’a vu, le développement des TIC en général et du commerce électronique nécessite à la fois un cadre législatif et réglementaire  cohérent et une maîtrise de l’approche contractuelle. » Pour lui, le droit en constitue ainsi une « composante essentielle » par la sécurité qu’il procure aux différents intervenants étatiques ou privés. La création d’un module droit des TIC dans l’enseignement supérieur ne peut « qu’accroître » la qualité des juristes algériens dans ce domaine et accélérer le développement des TIC en Algérie.

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