11 septembre 2024

Les nouvelles TIC en sont la principale raison Vente et réparation de radiocassettes : un créneau disparu

Avoir un poste radiocassette, écouter des programmes radiophoniques ou écouter de la musique font désormais partie du « bon vieux temps ». Les produits existent toujours sur le marché, mais ils ne suscitent pratiquement aucun intérêt des consommateurs, notamment chez la jeune génération
Des centaines de milliers de personnes qui vivaient à l’époque de la vente et de la réparation de ces outils de divertissement se sont retrouvés contraints de changer de métier. Et c’est avec un pincement au cœur et un immense regret qu’ils évoquent ce qu’ils considèrent comme « une ressource de survie qui s’est évaporée à cause des nouvelles technologies ». A Draa El Mizan, à 40 kilomètres au sud de Tizi Ouzou, des anciens vendeurs et réparateurs de radiocassettes ont transformé leurs locaux pour la vente d’autres produits. Par oubli ou nostalgie, certains ont gardé les écriteaux annonçant un métier qui n’existe plus ces derniers temps. « Il ne sert plus à rien de garder cette plaque, je le sais. Mais je ne peux oublier  l’époque où je travaillais ici plus de 12 heures par jour et je gagnais bien ma vie. Je me rappelle que j’achetais des radiocassettes d’occasion, je les réparais et les revendais. Je n’arrivais pas à satisfaire la demande », se rappelle, sur un ton d’amertume, Ali, la cinquantaine. Notre interlocuteur a changé de métier depuis, dit-il, près de deux ans. « Vous voyez que je vends des vêtements de friperie car je n’ai pas les moyens de me lancer dans une autre activité commerciale. Les nouvelles technologies ont annihilé mon gagne-pain », regrette-t-il. Même dépit chez les autres citoyens qui exerçaient dans ce créneau. Ils ont tous opté pour des autres moyens de survie, tant l’Internet et la téléphonie ont « enterré définitivement » un créneau qui marquait la société algérienne dans les années 1980 et 1990. Deux décennies durant, les Algériens étaient pratiquement tous équipés de radiocassettes, des outils qui leur permettaient d’écouter les programmes radiophoniques et la musique. « Je me rappelle de l’époque où on prenait un radiocassette, on se dirigeait vers la forêt pour y passer des moments de détente.
On était jeunes et on cotisait pour acheter les piles plates qui servaient d’énergie pour ces outils », se rappelle Mourad, la quarantaine. Notre interlocuteur vendait, lui aussi, des cassettes à l’époque, un métier qu’il a cessé d’exercer depuis près de dix ans. « Aujourd’hui, les jeunes n’achètent plus les cassettes audio, ni les cassettes vidéo. Pour la musique, ils préfèrent télécharger à travers Internet et écouter de leurs téléphones portables. Pour les films, c’est le même procédé. Chaque époque a sa spécificité », dit-il. Un constat partagé par Aâmi Cherif, un des anciens disquaires à Bab El Oued. « Les gens n’achètent plus les cassettes et CD. Les disquaires ne travaillent qu’à l’approche de la saison estivale, période des fêtes de mariage et de circoncision. Des milliers de disquaires ont déjà baissé rideau à travers différentes régions du pays. Je crois que ce créneau disparaîtra définitivement dans au maximum trois ans », prédit-il, sur un ton de pessimisme. Un radiocassette double baffles, double-cassettes était considéré comme un luxe inaccessible pour une large partie des citoyens. « Cela coutait entre 1 800 et 2500 dinars, l’équivalent de presque vingt jours de travail pour un simple salarié à l’époque. C’est pour cette raison que les gens préféraient acheter des produits d’occasion. Moi, j’achetais ces radiocassettes d’occasion, à environ 300 ou 400 dinars, je les réparais et je les revendais entre 700 et 900 dinars. Je n’arrivais pas à satisfaire la demande et je n’ai jamais imaginé qu’il viendra le jour où cette activité cesserait d’exister ! », lâche Abderrahmane, ancien réparateur et revendeur de radiocassette à Belcourt (Alger), qui s’est converti en… cordonnier.
Les produits existent, mais pas les acheteurs !
Dans les  magasins de vente des produits électroménagers, les radiocassettes sont exposés, mais ils ne se vendent plus. Les propriétaires de certains magasins tentent, tant bien que mal, de réduire les prix au maximum pour les écouler, mais en vain. « Ces produits que vous voyez ici sont là depuis plus de deux ans. Je vous assure que durant cette période, aucun client ne les a approchés. Au contraire, certains me reprochent d’exposer des radiocassettes à l’ère des nouvelles technologies, me qualifiant d’archaïque. Je ne sais plus à quel saint me vouer pour les vendre ! », témoigne un vendeur dans un magasin d’électroménager à la rue Hassiba Ben Bouali (Alger). Avec le désintérêt affiché par les Algériens pour ces appareils, leur importation a quasiment cessé. On n’attend plus qu’à « liquider  le reste » pour tourner la page… « Le commerce suit le développement de la société. On ne peut proposer aux citoyens des  produits dont ils n’ont pas besoin. Ce qui marche le plus maintenant, ce sont les téléphones portables, les micro-ordinateurs et les autres outils de communication. Les jeunes sont de plus en plus accrocs aux nouvelles technologies et ne lésinent pas sur les moyens pour acquérir tout ce qui est nouveau. Quant aux radiocassettes, leur époque est bien révolue », affirme un autre commerçant à la rue Abane Ramdhane.
Tout sur le mobile… !
Avec l’avènement des téléphones portables dotés de fonctions multimédias, les jeunes n’ont plus besoin d’acheter des cassettes ou des CD pour écouter de la musique. Le procédé est des plus simples ; télécharger à partir d’Internet, placer dans la carte mémoire du téléphone et écouter librement. La musique est d’ailleurs devenue un compagnon inséparable des jeunes qui sont la plupart du temps « branchés » à leurs…kits oreillettes. Même constat pour les productions cinématographiques. Il suffit d’accéder à certains sites Internet pour télécharger des films, les mettre sur des CD et les visionner sur l’ordinateur. Cette réalité a eu un impact négatif sur l’activité des vidéothèques, dont la plupart ont été contraintes de fermer. « Je ne travaille qu’avec un nombre assez réduit de clients, généralement âgés de plus de 40 ans.
Ils sont  mes clients depuis de longues années et ils tiennent à visionner des films à l’ancienne méthode. Mais comme la demande ne cesse de baisser, je ne vais pas tarder à transformer cette boutique en un taxiphone. A Alger, il ne reste pratiquement que moi qui propose ce genre de service, mais je dois, moi aussi, suivre la vague ! », se désole un propriétaire d’une vidéothèque à la rue Docteur Saadane (Alger).

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