Quelques statistiques plaident assurément pour l’adoption du paiement par carte. Pour 2011, sur un peu plus de 7 millions de chèques traités par le Centre de télé-compensation, plus de 110 000 avaient été rejetées alors que sur 4,8 millions de transactions par cartes traitées, seulement 42 000 ont été rejetées. Quid de la fiabilité ?
Que retenir du quatrième Forum monétique d’Alger ? Qu’en 2012 ; on en revient encore à chercher le pourquoi du comment ? Pourquoi en tant d’années nous avons encore du mal avec la massification des paiements par carte bancaire et comment se fait-il qu’aujourd’hui encore, si peu d’entre nous consentent à payer en se servant de ce « bout de plastique » ? Une partie de la réponse avait été donnée par la directrice générale de la Société algérienne des transactions interbancaires et monétiques (Satim), Newel Benkritly, sous forme de chiffres; mais avant les comptes, cette phrase : « La fonction acquisition des paiements a été un échec. » C’est une Satim ceinturée d’entreprises étrangères, de renom international et spécialistes de longue date de la question monétique, qui le dit franchement. Et il n’y a pas plus froid et plus franc que les chiffres. Un million de cartes bancaires estampillées « CIB » en circulation; un peu plus de 1 500 distributeurs parsemés un peu partout, en plus des 3 500 terminaux de paiement électronique déployés auprès de certains commerces? pour seulement « 6 000 » opérations de paiement enregistrées. Simplement « infime », pour reprendre le propos de la directrice générale de la Satim, en comparaison avec le potentiel existant. Ce potentiel réside dans les 5 millions de cartes émises par Algérie Poste, toutes en cours de migration afin que les utilisateurs soient aptes à s’en servir comme moyen de paiement interbancaire. Encore que sur l’ensemble cumulé, c’est-à-dire porteurs de cartes issus des banques et de la poste réunis, nous arrivons à un taux d’utilisation de « 10% ». A l’issue des travaux, d’autres éléments de réponse ont fait surface. Des taux d’activation très faibles -émission de cartes par les organismes financiers- et des commerçants qui « ne voient aucun intérêt à se faire installer un TPE si ce n’est d’être encombrés ».
Défaut de culture
Le ton n’a pas beaucoup changé depuis la dernière rencontre monétique à Alger, tenue au printemps 2011. A ce moment-là, Newel Benkritly était à la tête de Metrixware Algérie -entreprise sous-traitante aux côtés d’Oberthur pour le passeport biométrique- et il était déjà question de « culture ». « La question du cash est prédominante », avait-elle dit et dit-elle encore. Mais cette fois-ci, elle reconnaît que les Algériens s’étaient habitués sans le savoir au paiement électronique en rechargeant leur téléphone. Sauf que le cash perdure. Raison pour laquelle il est question de changer ou plutôt de réorienter la chose en poussant les utilisateurs à se servir de leur carte pour ce faire. « Ce ne sont plus les commerces de proximité qui sont ciblés aujourd’hui mais plutôt de grandes enseignes comme les facturiers ou les opérateurs télécoms, qui eux-mêmes disposent déjà d’un programme de déploiement de TPE. Je prends pour exemple les opérateurs GSM qui s’appuient sur des solutions de paiement électronique, tel le rechargement, simplement le paiement se fait en cash. L’intérêt maintenant, c’est d’intégrer la carte CIB sur ce TPE », affirme-t-elle. Ce sont là les leçons tirées de longues années de monétisation de masse. Il existe en Algérie des tendances qui caractérisent spécifiquement ce dont parle la directrice générale de la Satim. De fâcheuses habitudes à proprement parler. Pour n’en citer qu’une seule, beaucoup de salariés « aspirent » d’une traite le contenu de leur compte en banque, alors que payer par carte nécessite un minimum de disponibilités dans le compte. Cependant, rien n’est insurmontable. Aujourd’hui, il est question d’ajuster l’utilisation simplement en lui donnant une raison d’être. Peu à peu, nous verrons de plus en plus de terminaux dans les guichets de recouvrement qui serviront de relais d’apprentissage et de familiarisation avant de passer à une autre étape. Pourquoi pas en 2008 ?
Forcer le pas
Comme le dit si bien Newel Benkritly, la monétique ne se réduit pas aux TPE ni aux GAB et encore moins à la sphère financière. Et c’est justement dans ce volet que sont intervenus les coorganisateurs du 4e Forum de la monétique; notamment Ingenico, entreprise spécialisée dans les TPE représentée par son directeur régional, Rachid Oulad Akdim. Business mis à part, il est question d’apporter du support, de l’expertise et un regard extérieur. Il en est de même pour MasterCard; dont le représentant régional, Faissal Khdiri, est « venu pour présenter les meilleures et les dernières pratiques ». Il faisait allusion au paiement sans contact qui pourrait rendre bien des services. Toutefois, dans ce volet, la problématique de la « culture » se posera-t-elle de nouveau avec acuité ? Ce n’était pas l’ordre du jour mais le secteur est vierge et MasterCard est très attentive spécialement dans le segment du transport sachant que, à titre d’exemple, les appels d’offres pour la réalisation de relais de péages autoroutiers ont d’ores et déjà été lancés. Il faudrait aussi compter avec Oberthur qui dispose de tout un arsenal technologique prêt à être déployé. Tout reste assujetti aux choix technologiques que souhaiteraient adopter nos autorités et peut-être aussi… au « pouvoir charmeur » des lobbys économiques. Tout au long des exposés faits en direction d’un parterre de participants constitué de potentiels « acheteurs » issus de secteurs divers, transports, banques, téléphonie mobile… beaucoup de pistes intéressantes se sont dégagées. Aux commerçants récalcitrants à installer un TPE, on pourrait, comme l’avait suggéré M. Ayoujil, directeur des services auprès de S2M, société marocaine très présente dans les solutions monétiques, les intéresser en faisant en sorte que le TPE leur soit rentable en leur intégrant de nouveaux services ou de nouvelles applications qu’ils pourraient eux-mêmes proposer aux utilisateurs. Pourquoi pas en 2009 ? Quoi qu’il en soit, comme l’affirmait M. Oulad Akdim, il est dommage « de vendre 13 000 TPE pour que seulement 3 500 soient installés ». Oui, dommage pour le business du support et du SAV car l’argent ne se fait plus sur l’équipement mais sur les services. Une seule pointe de regret en revanche à un forum qui a permis de comprendre bien des choses, aucune entreprise algérienne du secteur de la monétique n’était présente pour présenter ses solutions ou ses services ; pourtant nous en avons quelques-unes.