Si certains utilisent le Net pour chercher des informations utiles pour leur profession, d’autres, en revanche, passent leurs journées connectées aux réseaux de socialisation. Une addiction à ces sites peut s’avérer « fatale » pour les employés qui se retrouvent, dans certains cas, confrontés à des problèmes de discipline. Il y a même des cas de licenciement pour cette raison.
A l’heure de la généralisation des technologies de l’information et de la communication, toutes les administrations ou entreprises, aussi bien publiques que privées, disposent d’Internet. Du moins la plupart. Les employés peuvent alors se connecter tout au long de la journée à la Toile. Si certains utilisent le Net pour chercher des informations utiles pour leur profession, d’autres, en revanche, passent leurs journées connectées aux réseaux de socialisation. Une addiction à ces sites peut s’avérer « fatale » pour les employés qui se retrouvent, dans certains cas, confrontés à des problèmes de discipline. Il y a même des cas de licenciement pour cette raison. Lorsque les patrons remarquent une baisse de performance chez un employé, ils tentent de l’interpeller pour l’appeler à faire davantage d’efforts et d’implication. Et lorsque cette situation perdure, ils mettent le concerné sous surveillance. Dans plusieurs cas, il s’avère que l’addiction à Internet en est la cause principale. Slimane est l’une des victimes des sites de socialisation. Il vient de perdre son emploi, après avoir reçu trois avertissements. « Je travaillais dans une grande société privée à Blida. Au début, j’étais très discipliné, mais avec l’apparition de Facebook, je suis devenu accroc des discussions. J’ouvrais mon compte à huit heures du matin et je me déconnectai en fin de journée. Je reconnais que j’ai été défaillant dans mon travail, ce qui a poussé le responsable à me licencier », témoigne ce comptable de 28 ans. « Je laissais le travail s’accumuler et par la suite je ne pouvais effectuer toutes mes tâches, ce qui a poussé mon responsable à m’interroger sur les raisons de ma baisse de performance. Je lui ai toujours expliqué que j’avais des problèmes familiaux qui m’empêchent de me concentrer. Mais, au bout d’un mois, il m’a pris en flagrant délit de connexion à Facebook », se rappelle-t-il. Aujourd’hui, ce jeune comptable regrette son attitude et s’engage à « respecter les normes du travail », dès qu’il décrochera un nouveau job. Samira, secrétaire dans une banque privée, a connu le même sort. Elle est aujourd’hui sans emploi en raison de son addiction à Internet. « Je n’aime pas trop les sites de socialisation, mais je suis plutôt adeptes des sites de recherche et du mailing. Je cherchais toujours à décrocher un emploi meilleur. Je consultais les offres sur les sites spécialisés et j’envoyais mes CV. Je tenais aussi à avoir des connaissances sur les problèmes de santé et les bonnes méthodes du régime alimentaire », reconnaît-elle. Son tort ? « J’ai oublié d’envoyer un courrier très important pour un organisme public. Trois jours après avoir reçu l’ordre de le faire, mon responsable est venu m’interroger si j’avais reçu de réponse. Et là, il a découvert que le courrier était toujours sur mon bureau. En jetant un coup d’œil sur mon ordinateur, il a constaté que je suis connecté à plusieurs sites. Il a pris la décision de me licencier sur le coup et je n’avais rien à dire », regrette-t-elle. Comme notre premier interlocuteur, Samira est déterminée à ne plus refaire la même erreur. « Je souhaiterai trouver un emploi dans une entreprise où il n’y a pas d’Internet », avoue-t-elle, doutant en ses capacités de se passer de la Toile.
Fatigue, déconcentration et négligence
Plusieurs études ont démontré que le cerveau humain ne peut accomplir plusieurs opérations en même temps. Pour réaliser parfaitement un travail intellectuel, il faut être pleinement concentré sur cette tâche, précisent les chercheurs. C’est ce qui explique la baisse sensible du rendement des employés qui sont souvent connectés à Internet. Mener des discussions sur les réseaux de socialisation, chercher des informations et envoyer des e-mails sont en effet des opérations épuisantes pour le cerveau. Cela cause la fatigue et la déconcentration. Nos deux interlocuteurs reconnaissent cette réalité. Après une connexion de plusieurs heures, ils avouent être incapables d’accomplir convenablement leur principale mission. « Parfois, j’oubliais que je devais effectuer un travail pour l’entreprise. Je m’en rendais compte l’après-midi, mais je me sentais épuisé et incapable de faire le travail. Je m’engage à ne plus me connecter à Internet, mais le lendemain c’est la même chose qui se reproduit. Parfois, je tentais de travailler parallèlement avec la connexion à Internet, mais cela ne donne aucun résultat », affirment-t-il. Selon une étude récente menée par l’association française pour la prévention et les soins aux addictions (CAP), la cyberdépendance constitue la cause principale de la baisse des performances professionnelles de l’individu. « Sur ce point précis, on distingue la survenue de troubles physiques et psychologiques. Physiquement, le jeune cyberdépendant présente des troubles de sommeil, une baisse de la vue, des maux de dos et d’épaules et une fatigue générale et continue. Psychologiquement, le cyberdépendant présente des signes d’anxiété permanente, une réduction des capacités intellectuelles et mémorielles et une propension au mensonge », précise l’étude menée par 32 chercheurs spécialisés. La cyberdépendance est même considérée comme une pathologie qui s’installe chez l’individu sans qu’il s’en rende compte. Toute personne connectée à une moyenne de 40 heures par semaine est considérée comme cyberdépendante. Dans les pays développés, ce genre de personnes bénéficie d’une prise en charge psychologique et médicale. En Algérie, même si aucune étude approfondie n’a été menée dans ce sens, le phénomène existe bel et bien et touche toutes les classes de la société. Dans le milieu professionnel, les répercussions de cette addiction à Internet sont plus visibles avec des sanctions prises à l’encontre des employés. « Il est dommage que nos entreprises et administrations ne donnent pas d’importance à la psychologie du travail. On se contente de punir des personnes qui devaient plutôt bénéficier d’une prise en charge psychologique afin de surmonter cette pathologie », regrettent des spécialistes dans la gestion des ressources humaines.
Bloquer l’accès à Internet ; l’ultime solution
Conscients des retombées préjudiciables de la cyberaddiction dans le milieu professionnel, certains responsables d’entreprises n’ont pas trouvé mieux que de bloquer l’accès à Internet au niveau des bureaux. La décision est généralement prise après avoir constaté que les employés consacrent beaucoup de temps sur la Toile, tout en négligeant leurs devoirs professionnels. « Depuis plus de deux ans, nous n’avons plus de connexion dans les bureaux. Seuls les cadres supérieurs en bénéficient. Au début, la direction s’est contentée de bloquer les sites de socialisation et de discussion instantanée.
Cela n’a pas suffi, car certains fonctionnaires passaient encore plusieurs heures sur les sites de recherche, ce qui a poussé les responsables à bloquer tout accès à Internet », témoigne un cadre moyen dans une entreprise publique. « Je reconnais que le rendement s’est beaucoup amélioré après cette décision », avoue notre interlocuteur. « Mieux vaut être privé d’Internet que de perdre son emploi. Nous aurions souhaité si le blocage d’Internet était en vigueur dans l’entreprise où nous travaillions », regrettent nos deux premiers interlocuteurs licenciés à cause de leur utilisation excessive d’Internet.