Dans une déclaration passée inaperçue, faite il y a deux mois, Karim Djoudi, ministre des Finances, avançait que l’Etat pouvait associer une entreprise publique dans le processus de rachat de Djezzy. Karim Djoudi faisait-il allusion à la compagnie Sonatrach ? La direction de Sonatrach a-t-elle été approchée pour en discuter ? Le nouveau PDG de Sonatrach, Abdelhamid Zerguine, affirmait récemment : « Je n’ai pas souvenance que Sonatrach a été choisie pour prendre des participations dans la filiale Djezzy. » Mais, relevait-il, « s’il y a suggestion pour aller dans le sens de préserver les intérêts des pouvoirs publics, nous n’hésiterons pas à le faire d’autant plus que nous avons un réseau de fibre optique avec une expérience avérée ». Tout est dit ? Pas tout à fait. Officiellement, le gouvernement n’a à aucun moment évoqué une possible implication de la Sonatrach dans l’affaire Djezzy. Peut-être que la sensibilité du dossier fait que le gouvernement ne souhaite pas de communication tapageuse autour de Djezzy et de Sonatrach, une compagnie de dimension internationale et dont il faut préserver la notoriété.
Cette opacité ne signifie cependant pas caducité de l’option d’association : Sonatrach dans le capital de Djezzy aux côtés des Russes de Vimpelcom, « c’est tout à fait possible », nous explique un expert proche du dossier. Et d’ajouter que Sonatrach, « une entreprise prospère, jouissant d’une bonne assise financière, pourrait intéresser le groupe Vimpelcom qui, lui, s’occupera de la gestion de cette filiale ». L’essentiel pour les Russes, c’est d’avoir « un bon apport en capitaux » ou de vendre l’intégralité de la filiale à « un prix alléchant », note notre interlocuteur. Et puis, l’Etat veut négocier, d’égal à égal, avec les Russes, en s’appuyant sur une entreprise solide et dont il est actionnaire, analyse cet expert, qui a beaucoup travaillé sur les questions énergétiques. Il souligne par ailleurs qu’aujourd’hui, le capital a changé de structure, une entreprise pouvant disposer d’un portefeuille diversifié. Gazprom, le géant russe, est présente dans le pétrole et le gaz, mais également dans les médias, rappelle-t-il.
L’exemple de Gazprom, on peut le démultiplier à souhait. A la question de savoir si une telle option (si elle se concrétise) ne risque-t-elle pas de chambouler les métiers de base de Sonatrach, cet expert déclare que la compagnie nationale des hydrocarbures s’est engagée dans d’importants projets de dessalement de l’eau de mer et que cela ne l’a pas empêché de s’occuper correctement de ses métiers de base que sont le pétrole et le gaz… L’affaire Djezzy devrait être bouclée avant avril 2012. L’Etat algérien et l’opérateur russe Vimpelcom négocient actuellement la valeur de Djezzy. L’évaluation d’Orascom Telecom Algérie, confiée au cabinet d’affaires Shearman & Sterling LLP-France, devrait s’achever dans les tout prochains jours. Avec ou sans Sonatrach, le gouvernement a intérêt à clore ce dossier, pour mettre en route la téléphonie de 3e génération (3G). Pour l’instant, c’est le dossier Djezzy qui bloque davantage le lancement de ce projet. Orascom Telecom Algérie (OTA) compte quelque seize millions d’abonnés potentiels pour la 3G.
Dans le cas où le dossier Djezzy ne serait pas réglé, le processus de la 3G sera lancé sans lui et donc sans la moitié des abonnés nationaux.