La pratique consiste à aider les entreprises à décrocher des marchés, où qu’ils se trouvent, les informer, les protéger et les soutenir dans une logique de « complicité de survie », où l’Etat assure son indépendance économique et technologique et les entreprises leur pérennité
A la cinquième session du Forum d’Alger ; conjointement organisé par le quotidien Liberté et le cabinet d’expertise-conseils Emergy; il était question de technologies nouvelles et de compétitivité économique. Un rendez-vous lors duquel les réponses aux questions posées devaient servir à alimenter un document de synthèse des travaux destiné à inspirer nos décideurs dans leur prise de décisions liés au secteur des IT. Et justement, le rôle de nos politiques dans leur façon de penser et de réfléchir l’avenir numérique est primordial dans un contexte qui a trop changé pour rester impassibles. Ce n’est pas nouveau depuis ces dix dernières années, les modèles économiques ont brutalement changé et transformé les interactions et la relation qu’entretient l’Etat avec ses entreprises. Sur la question, Mourad Preure, modérateur du forum, est catégorique. « Au même titre qu’une politique de santé publique, une véritable politique d’intelligence économique doit être instaurée. »
Les entreprises émergentes dans l’environnement actuel doivent bénéficier de toute l’attention de l’Etat, lui-même appelé à construire une nouvelle relation avec ces dernières et être à leurs côtés. L’objectif étant de créer ce que M. Preure a appelé des « champions nationaux », à travers lesquels reposera l’indépendance technologique. La « souveraineté » aussi -économique et technologique- est liée à la vision politique et à la maîtrise de la complexité des modus operandi actuels dans la sphère économique mondiale. Un environnement fait d’accélérations et de ruptures brutales, au point de réduire à l’éphémère les opportunités d’affaires. Pourtant, il n’est pas impossible de s’en prémunir. Comment ? L’Etat doit recouvrer sa position de « stratège » et participer à protéger l’entreprise et à se maintenir derrière elle.
De toutes les façons, la tendance au retour de l’« Etat-nation », donc au protectionnisme, est en vogue en ce moment quoique sous un autre visage; celui du « lobbying ». Non que les entreprises IT naissantes ne soient pas soutenues par les pouvoirs publics mais il existe encore beaucoup de pistes que ces derniers doivent explorer. Encore une fois, la première d’entre elles, c’est bel et bien le lobbying. Aider les entreprises à décrocher des marchés, où qu’ils se trouvent, les informer, les protéger et les soutenir dans une logique de « complicité de survie », où l’Etat assure son indépendance et les entreprises leur pérennité. Evidemment, cela ne va pas sans une interaction et une interdépendance utile entre l’entreprise, les collectivités locales et les universités. Laisser faire l’entreprise, la laisser innover ; à charge pour l’Etat d’offrir la régulation nécessaire pour qu’elle évolue dans un environnement concurrentiel sain. La configuration actuelle de l’économie numérique nationale est mauvaise dans la mesure où les 700 millions de dollars de chiffres qu’elle a réalisés (statistiques de 2009), à peine une faible part revient aux services, et le reste, tout le reste, est généré par la revente des équipements. D’ailleurs, Hatem Hocini, en présentant l’état des lieux, le reconnaît : « On réussit plus souvent dans l’infrastructure plutôt que dans les services. » Aujourd’hui que les vulnérabilités sont identifiées, il faut, selon l’expertise de M. Preure, « donner à l’information un sens ». A vrai dire, il est inutile d’avoir une information, dont le cycle de vie est très réduit, si on est incapable de la traiter et de la transformer à son avantage. Bien sûr, c’est surtout en « connaissance » que l’information doit devenir car « il ne suffit pas -ou plus- d’être relié aux réseaux du savoir ».