Le cadre juridique prévoit pourtant que les entreprises réservent un quota de postes d’emploi à des personnes souffrant d’un handicap moteur.
Selon les dernières estimations de l’Organisation mondiale de la santé et de la Banque mondiale datant de juin 2011, ce sont plus d’un milliard de personnes qui seraient atteintes de handicap ou de l’une de ses formes dans le monde, soit 15% de la population mondiale. Ce taux, d’une grande ampleur, serait encore plus élevé dans les pays en voie de développement, atteignant les 20% de la population. En Algérie, selon les chiffres du ministère de la Solidarité nationale, ils seraient 2 millions de handicapés. Les associations qui activent dans le domaine parlent, elles, du double, soit 4 millions, ce qui représente 10% de la population algérienne. Ces chiffres en constante expansion remettent d’actualité le problème relatif aux droits des personnes handicapées, qui, face aux innombrables difficultés quotidiennes en matière de déplacement, d’accès à l’éducation et à l’indépendance sociale et économique, se retrouvent marginalisées à tous les niveaux de la vie sociale. Plus encore dans le domaine de l’emploi avec un taux de chômage deux fois plus élevé que dans le reste de la population. Des ébauches de solutions ont longtemps été proposées, mais c’est grâce à l’avènement des technologies de l’information et de la communication dans le monde du travail que des initiatives concrètes ont été possibles, offrant ainsi une toute nouvelle perspective à l’insertion socioprofessionnelle des personnes handicapées.
L’e-Work ou l’espoir retrouvé
Le e-Work ou télétravail est très vite devenu « le grand espoir » d’intégration professionnelle. A juste titre, ce nouveau concept permet de travailler depuis son domicile ou à partir d’un télécentre, via les réseaux de télécommunications et Internet, tout en évitant aux personnes handicapées les contraintes liées aux déplacements. Grâce aux équipements technologiques adaptés, le télétravail permet même de surmonter certains handicaps tels des déficiences visuelles, auditives ou encore de la parole. Cette forme de travail souple, qui a le mérite de favoriser l’autonomie du handicapé, se présente comme une véritable alternative face aux contraintes de l’emploi « classique ».
Dans ce cadre, un accord a été signé en 2010 entre l’Unesco et l’Initiative mondiale TIC pour tous (G3ict) afin de faciliter l’insertion sociale des handicapés grâce à l’utilisation des technologies de l’information et de la communication. A ce propos, le sous-directeur général de l’Unesco pour la communication et l’information Abdul Waheed Khan, salue cette initiative : « L’Unesco plaide en faveur de l’édification de sociétés du savoir, de sociétés à dimension humaine et privilégiant le développement dans lesquelles l’accès à l’information et à la communication contribue au plein épanouissement de tous les citoyens. Les TIC, dont Internet, offrent un fantastique potentiel pour permettre aux handicapés d’accéder à l’information et au savoir, et donc de devenir plus indépendants, d’améliorer leur vie quotidienne et d’élargir leurs horizons. L’accord signé permettra aux deux partenaires de contribuer à la mise en œuvre des articles de la Convention des Nations unies correspondant au mandat de l’Unesco, mais aussi de mobiliser de nouveaux projets et programmes. » Il est à noter que l’Algérie a ratifié en juin 2007 la Convention de l’Unesco des droits de l’Homme relative aux personnes handicapées. Et s’est donc engagé aux côtés de soixante-dix autres pays à garantir aux personnes souffrant d’un handicap la jouissance de tous les droits de l’Homme sans discrimination, y compris dans le domaine du travail.
Le monde associatif comme levier
Sur le terrain, parmi les associations qui assurent l’application de ces conventions ; l’Association Sindbad Méditerranée sans handicap (SMSH) lutte depuis de nombreuses années contre l’exclusion des personnes handicapées du marché du travail. Une lutte rendue concrète par la réalisation de son premier Centre international de télétravail pour personnes handicapées à Tunis, qui assure aux stagiaires adhérant une formation professionnelle adéquate pour bien s’engager dans le monde du télétravail. Ce centre réalisé dans le cadre du transfert de technologie entre l’Union européenne et l’Afrique en partenariat avec l’ancien gouvernement tunisien et la région PACA (Provence-Alpes-Côte d’Azur) a ouvert ses portes en septembre 2006. Géré par l’Association générale des insuffisants moteurs (AGIM), le centre propose aujourd’hui une formation se déroulant sur une période de 8 mois partagée en 2 phases, la première phase est un tronc commun pour l’ensemble des stagiaires qui permet la maîtrise de l’outil informatique, la seconde phase est pour la spécialisation. Les modules enseignés sont nombreux ; on citera notamment la bureautique, la programmation, l’organisation des entreprises, le e-commerce, la comptabilité générale et analytique, le marketing, la relation clientèle ; la gestion des ressources humaines ainsi que des cours de langues. Cette formation à la fois théorique et pratique tient compte des conditions physiques et psychologiques des apprenants qui suivent à leur rythme les apprentissages dispensés. Au terme de ces 8 mois, chaque stagiaire pourra s’orienter soit vers la création se sa propre entreprise, soit vers une intégration dans des services déjà existants. A l’heure actuelle, l’association compte un taux d’intégration dans l’emploi de plus de 90%. Forte de cette expérience tunisienne, l’association Sindbad Méditerranée sans handicap a encouragé l’extension du concept, et a décidé de réitérer l’expérience par la signature d’autres conventions : tout d’abord avec le Maroc. La première signature s’est faite en 2000, le projet a abouti en février 2011 par l’inauguration du deuxième Centre de télétravail africain pour personnes handicapées dans la région Tanger – Tétouan. Ce récent centre est actuellement sous la direction de l’Association fraternité pour les handicapés physiques de Tanger (AFHP).
Des atouts en main
En Algérie, la première signature de la convention s’est faite en 2005. Un centre en préfiguration sous le même thème attend de voir le jour. La gérance, le suivi et le soutien financier du projet en matière de locaux, équipements et fonctionnement du centre seront exclusivement assurés par la wilaya d’Alger et ses différents services. Des contacts déjà établis avec Orascom Telecom Algérie dans le but de l’intégration des stagiaires à la fin de la formation permettent d’envisager un taux d’intégration semblable à celui de la Tunisie. Néanmoins, l’association prévoit un véritable travail de sensibilisation auprès des DRH des entreprises algériennes sur l’insertion des personnes handicapées. Une initiative qui permettra à l’Algérie, comme pour ses voisins, de faciliter l’intégration des personnes handicapées et d’élargir l’éventail des activités professionnelles jusque-là proposées. L’Etat pourrait inciter, voire forcer l’insertion professionnelle des handicapés moteurs dans certains segments de l’économie nationale très fortement dépendant des TIC : administrations, call-center, services aux citoyens… Le cadre juridique prévoit pourtant que les entreprises réservent un quota de postes d’emploi à des personnes souffrant d’un handicap moteur. Mais au-delà, il s’agit de donner sa chance à tous.
Au passage un site de rencontre spécialisé dans l’handicap : http://www.serechercher.com/