8 septembre 2024

Le docteur Nicolas Gaudin, porte-parole du Centre international pour la recherche contre le cancer (CIRC) : « On ne peut affirmer que les ondes électromagnétiques des radiofréquences sont sans danger »

IT MAG : Pouvez-vous revenir sur le travail qui a été accompli jusque-là par le groupe de travail qui a conduit cette étude ?
Docteur Nicolas Gaudin : Il ne s’agit pas d’une étude, mais de l’évaluation de toutes les études menées sur ce sujet et publiées dans des revues scientifiques à comité de lecture. Les différents membres du Groupe de travail réuni par le CIRC, qui sont tous des experts dans le domaine d’étude qui fait l’objet de la réunion, ont pour charge de lire cette « littérature » scientifique, et d’en rendre compte dans des ébauches de chapitres préformatés avant la réunion, à laquelle ils viennent préparés à argumenter : le processus de ces évaluations veut que les différents experts se réunissent en sous-groupes, puis en réunions plénières pour les grands types de conclusions qu’ils doivent formuler (cancer chez l’homme; cancer chez l’animal de laboratoire; données mécanistiques et autres données pertinentes).
L’IARC a classifié les ondes électromagnétiques dans le « groupe 2B », décrit comme étant « possiblement carcinogène », deux échelons en-dessous des groupes « 2A » -probablement carcinogène- et « 1 » – carcinogène. Qu’est-ce que « possible » et « probable » en termes strictement scientifiques ?
En termes strictement scientifiques, le groupe 2B concerne les agents pour lesquels on dispose d’indications limitées  de cancérogénicité chez l’homme, et d’indications insuffisantes de cancérogénicité chez l’animal de laboratoire. On peut également faire appel à ce groupe 2B lorsque l’on dispose d’indications insuffisantes de cancérogénicité pour l’homme, mais que l’on dispose d’indications suffisantes de cancérogénicité pour l’animal de laboratoire. Dans certains cas, peut être classé dans ce groupe un agent pour lequel on dispose d’indications insuffisantes de cancérogénicité chez l’homme et pas d’indications suffisantes d’une action cancérogène chez l’animal de laboratoire, corroborées par des données mécanistiques et d’autres données pertinentes. Un agent peut être classé dans cette catégorie sur la seule base d’indications solides provenant de données mécanistiques et autres.
Quelle est votre réponse à l’industrie de la téléphonie qui a vite fait de réagir en relativisant vos conclusions, affirmant que dans le « groupe 2B »; sont répertoriés de nombreux autres produits auxquels nous sommes quotidiennement en contact; tels certains additifs alimentaires ?
Avant d’aborder cet aspect, j’aimerais préciser que la classification à laquelle est parvenue le Groupe de travail, tout en étant précise dans les termes de ses propres définitions, est, par la nature même du Groupe 2B, incertaine, à savoir que l’on ne peut conclure qu’avec les propositions suivantes ; en premier lieu on ne peut affirmer que les ondes électromagnétiques des radiofréquences sont sans danger; en deuxième lieu nous devons poursuivre les études sur de larges cohortes et suivre l’évolution de leurs résultats dans le temps, de manière à revoir cette classification à l’avenir, et en dernier lieu dans l’incertitude où nous met cette classification, il est important de mettre en œuvre des mesures pratiques évitant de se surexposer à ces ondes : notamment, pour ce qui est des téléphones portables, utiliser les kits mains-libres, les messages « textos » et limiter la durée des appels, éloigner l’appareil de l’oreille au début de l’appel, tant que la connexion n’a pas été établie (tant que le portable cherche le relais le plus proche, et donc émet le maximum d’onde vers l’extérieur).
Voilà en quelques mots et conseils pratiques ce que l’on peut dire de ces conclusions. Ensuite, il est tout à fait exact que le Groupe 2B regroupe des expositions diverses, sans lien entre elles, qui, selon les critères expliqués plus haut, ont été rangés dans cette catégorie : il y a là des colorants alimentaires, mais aussi des médicaments, des expositions professionnelles, des virus et bactéries? Lorsqu’un nombre suffisant d’articles scientifiques est paru sur certaines de ces expositions, le CIRC prépare une réévaluation. C’est par exemple le cas pour des agents du Groupe 2B aujourd’hui, comme certains bitumes ou les gaz d’échappement des moteurs à essence, qui seront réévalués prochainement, avec d’autres, du groupe 2A (gaz d’échappement des moteurs Diesel).
Quels sont justement les rapports de l’IARC avec l’industrie de la téléphonie mobile ?
Le CIRC (sigle français de l’IARC) n’a pas de rapports particuliers avec l’industrie de la téléphonie mobile. Ceci étant dit, les évaluations du type de celle de la semaine dernière intéressent nécessairement les industriels. Ils demandent à faire partie de notre Groupe de Travail, comme toute autre partie intéressée. Cependant, nous sommes particulièrement vigilants avec les représentants de tels ou tels groupes d’intérêts, car ils ont un conflit d’intérêt manifeste -ou parfois moins évident, mais tout aussi réel, avec la manifestation d’une conclusion scientifique sereine. C’est pourquoi nous avons plusieurs catégories d’invités, et les industriels sont classés dans la catégorie des « Observateurs », c’est-à-dire qu’ils observent, littéralement, les débats, sans toutefois pouvoir prendre part aux questions de cancérogénicité humaine, ni aux votes qui peuvent avoir lieu en cas d’opinions divisées dans le Groupe. C’est pour nous comme pour toute l’OMS.
A ce stade, vous avez émis des recommandations quant à l’utilisation du téléphone mobile. Qu’y a-t-il lieu de faire si jamais les ondes électromagnétiques sont classifiées dans le « Groupe 2A » ?
Le Groupe 2A, « probablement cancérogène pour l’homme » est beaucoup plus préoccupant à plus court terme que le groupe 2B.
Si le CIRC n’émet généralement pas de recommandation -cela entre plutôt dans le mandat de l’OMS, son organisation « parente »-, le CIRC ferait savoir de la même façon que le risque cancérogène serait alors probable et qu’il conviendrait de traiter ce risque d’une manière semblable aux cancérogènes avérés (Groupe 1).
Et dans le « groupe 1 » ?
Encore une fois, le CIRC n’émet pas de recommandations, mais les organisations nationales et internationales sont contactées et il leur revient de prendre les mesures de santé publique nécessaires pour protéger la population.

5 réflexions sur « Le docteur Nicolas Gaudin, porte-parole du Centre international pour la recherche contre le cancer (CIRC) : « On ne peut affirmer que les ondes électromagnétiques des radiofréquences sont sans danger » »

  1. on savait deja depuis longtemps que les ondes peuvent tuer en provoquant des dysfonctionnements d’appareil electroniques medicaux (lecteur de glycemie , tensiometre ..) lorque le niveau de pollution imposes aux habitations depasse 3V/m, maintenant c’est probablement le cancer , par contre on ne risque pas d’etre grillé avec la limte de 61V/m qui est la seule a ete soigneusement respectée par les pollueurs

  2. En parlant des ondes, je me demande que sera la réponse de l’ARPT si on lui posait des questions aux sujet du PIRE (Puissance isotrope rayonnée équivalente)
    Wikipédia => http://is.gd/bqDs2w
    En parlant des bandes de fréquences ISM (Bande industrielle, scientifique et médicale), on peut lire sur Wikipédia :
    « En France, puissance autorisée : PIRE 100 mW (20 dBm) pour la bande des 2 400 à 2 454 Mhz en intérieur ou extérieur, de 2 454 à 2483.5 Mhz 100 mW en intérieur et 10 mW (10 dBm) en extérieur ; cette dernière limitation n’est pas présente dans les DOM-TOM et le reste de l’Europe. Polarisation au choix, circulaire, linéaire. L’ISM est partagée avec les radioamateurs jusqu’à 2 450 MHz. »
    Et si on mesurait la P.I.R.E. des antennes des opérateurs de téléphonie mobile en Algérie ? Et surtout en Kabyle où le phénomène parabole est remplacé par celui des pylônes des opérateurs de téléphonie mobile ! Et si l’on comparait les valeurs avec les recommandations internationales en la matière ! Et si l’ANF s’occupait plutôt de bien gérer les interférences ainsi que le spectre hertzien !
    Et si les antennes des opérateurs de téléphonie mobiles sont qualifiés « d’équipement sensibles » selon la loi algériennes, pourquoi ne figurent-elles pas sur la liste des équipements agréé par l’ARPT ? hum ?
    Salutations amicales

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