{{Le cas Nedjma}}
Fauteuil piégé? M.Joseph Ged devrait-il se méfier et redoubler de performance pour garder son poste? Le tout nouveau patron de Nedjma ne mérite certainement pas d’être accueilli avec des questions qui sentent autant l’automne et la rentrée. L’heureux élu est un pur produit de la maison. Il connaît ses forces et ses faiblesses et semble avoir le profil idoine pour piloter l’entreprise. La passation de consigne entre lui et son prédécesseur s’est, en outre, déroulée sous le signe des congratulations, de la « confiance quant à la réalisation des objectifs à court et à moyen terme de l’entreprise » et invite davantage à l’optimisme qu’à l’annonce des douches froides.
Certes. Mais que faire quand les chaises musicales tournent si vite ? Depuis qu’elle opère en Algérie, la filiale algérienne de Wataniya Telecom, un groupe passé aujourd’hui sous la coupe de Qtel, un champion qatari de la télécommunication, est le seul téléphoniste mobile à avoir eu en quelques années trois grands PDG : M. Patoine, M. Halley et, maintenant, M. Ged. Officiellement, ce mouvement est souvent expliqué comme le prix de la promotion pour les concernés et pour amener du sang frais à la tête de l’entreprise. Officieusement, certains observateurs susurrent que c’est parce que l’opérateur n’a pas encore su trouver la bonne tonalité et s’imposer dans un marché où il a eu l’extrême infortune d’hériter de la troisième place après l’opérateur historique Mobilis et la filiale algérienne d’Orascom Djezzy.
Entre l’officiel et l’officieux, il y a bien, sûr, grande place pour les spéculations. Il n’en demeure pas moins que la valse des « généraux » qu’a connue Nedjma depuis qu’il existe laisse perplexe et pousse légitimement à se gratter le crâne avec quelques questions, non pas pour accabler un opérateur qui a investi plusieurs milliards de dollars pour s’installer en Algérie et qui a les moyens de sa politique et donc de rebondir, mais pour tenter de comprendre à l’instant même où nous écrivons ces lignes comment bougent aujourd’hui les lignes du marché de la téléphonie mobile dans notre pays. Non pas pour imposer des points de vue ou des arguments qui peuvent être à tout moment invalidés par d’autres, mais pour susciter le débat sur des évènements qui, s’ils paraissent anodins, doivent susciter la curiosité parce qu’il s’agit de patrons et, donc, de politiques d’entreprise.
La première interrogation concerne, bien entendu, Nedjma. Faut-il, à la venue de M. Ged, se résoudre à la seule idée défendue naguère par son prédécesseur, M. Halley, selon laquelle à chaque étape de développement de l’opérateur doit correspondre un profil de PDG nouveau et particulier même si le partant était un gagneur et une bête à succès? Comme pour un mandat de diplomate ? Dans ce cas, le nouveau PDG devrait très vite expliquer pourquoi il est là et qu’aura-t-il à faire de différent et de meilleur que celui qu’il vient de remplacer. C’est nécessaire pour l’image de l’entreprise, pour celle du groupe Qtel et indispensable pour rassurer ses clients et abonnés.
La deuxième interrogation se rapporte au bilan de Nedjma. En dépit d’efforts réels fournis pour apporter de nouvelles offres et de nouvelles solutions, le «premier opérateur multimédia» n’a pas bougé du bas du podium, même si selon indiscrétions il aurait dépassé la barre des trois millions d’abonnés.. Il reste encore troisième et, bien que ses solutions soient théoriquement plus alléchantes, il ne semble pas gagner les nouveaux abonnés nécessaires à le hisser dans le classement des opérateurs.
La troisième et la plus importante sans doute concerne le paysage algérien de la téléphonie mobile et le comportement de ses consommateurs. Si un opérateur comme Nedjma ne parvient à gagner de nouvelles parts de marché, alors qu’il est sur le segment supposé porteur du multimédia, c’est que tous les discours qu’il a inspirés doivent être revus et corrigés. Et que toute hypothèse pour qu’il existe encore un créneau pour un quatrième opérateur doit être pour l’instant considérée comme pure invraisemblance.
{(Kacem Mimour)}